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La qualité en bibliothèque : outils et retours d’expérience (Journée ABES 2010)

J’ai assisté aux journées ABES 2010. Notamment à l’atelier n°1 sur la qualité en bibliothèque. Vous trouverez mes notes sur les 4 interventions de cet atelier ci-dessous. Mais d’abord quelques commentaires/impressions sur ce que j’ai entendu.

– l’accueil reste très souvent le premier chantier des démarches qualité. Probablement parce qu’il constitue le premier contact de l’utilisateur avec l’établissement, celui qui donne le ton en matière d’expérience de l’usager. L’accueil est peut-être aussi le point sur lequel il y a le plus à faire. C’est d’ailleurs étrange  qu’une compétence aussi primordiale dans un service public fasse l’objet d’aussi peu de formations diversifiés ou de formations continues (sur le principe du recyclage SST), ces formations sont souvent traitées sur le mode de la grand-messe, intéressante dans sa dimension cathartique, pas forcément efficace sur le long terme.

– l’atelier a fait salle comble (dont un certain nombre de « décideurs »), on verra donc très prochainement de nombreuses expériences de démarche qualité dans les BU françaises (bon, ça va, on peut rêver à voix haute, hein !)

– selon O. Chourrot, la certification ne représente plus le Graal à atteindre pour les candidats. Certains services autrefois certifiés, comme La Poste, préfèrent s’auto-évaluer (en raison du rapport déséquilibré coût/bénéfices par exemple). Mais d’autres questions se posent, on a encore peu d’exemples solides d’auto-évaluation en bibliothèque (quelles méthodes ? quelles procédures ?) ; si la certification est délaissée, on peut se demander si le label (ISO 9001, Marianne) a encore/jamais eu une valeur auprès de nos publics ?

– Libqual a été abondamment évoqué dans cet atelier et ça fait plaisir. L’enquête entre petit à petit dans des dispositifs d’évaluation de plus en plus normalisés et constitue un outil d’auto-évaluation confirmé.

– on manque également de retours sur des démarches qualité dans les autres champs d’activité que l’accueil/renseignement : circuit du document, données bibliographiques, PEB, service de renseignement en ligne.  Peut-être plus d’infos lors de la journée Afnor-BnF 2010 le 7 juin prochain « Service documentaire : quelle qualité pour quels clients ? »

– enfin, la qualité en bibliothèque même sans parler de démarche ou de certification, on en parle de plus en plus. On évoque souvent les mêmes (BPI, Lyon 1 maintenant Paris Est) mais les expériences concrètes ont du mal à se renouveler. Si vous avez entrepris une démarche qualité dans votre BU ou votre BM, n’hésitez pas à communiquer et partager !

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OPDS Bookserver – Hadrien Gardeur (Feedbooks.com)

25 mai 2010 1 commentaire

Suite du compte-rendu, assuré en binôme avec Gaël, des Journées Couperin sur le livre électronique, qui se sont déroulées à Lille, les 17 et 18 mai.

Hadrien Gardeur est co-fondateur du site Feedbooks.com (profil LinkedIn) .

La plupart des acteurs du marché des livres électroniques sont dans un système similaire : distribution verticale (un appareil branché sur une source de contenu). Ce qui n’est pas sans poser une certain nombre de problèmes : choix restreint pour les utilisateurs, un seul mode d’acquisition (achat), expérience de découverte des contenus limitée, impossibilité d’importer des livres (en raison du format, des DRM ou de la politique du magasin)
Comment concilier la facilité d’utilisation sans les inconvénients ?

OPDS  est un écosystème, un web du livre. Il permet d’accéder à n’importe quel contenu depuis n’importe quel terminal

Qui est derrière OPDS ?

Internet Archive, O’Reilly, Adobe, Feedbooks, OLPC, Library of Congress, Aldiko

Quelles différences entre les solutions actuelles et l’OPDS ?

Différences dans l’organisation des contenus :
– c’est le créateur du catalogue qui détermine l’organisation hiérarchique du catagalogue (il n’est pas contraint par l’éditeur),
– Recherche
– Liens liés à la publication

Différences dans l’acquisition des contenus :
– Acheter
– Emprunter (à la bib, à un ami)
– s’abonner
– télécharger (domaine public, accès à un chapitre)

La technologie d’OPDS correspond à la technologie du web :
web =http+Xhtml+CSS+javascript
OPDS=HTTP+atom+métadonnées+liens

Le client permet de rajouter des sources de contenus. Exemple : application pour smartphone de Revues.org (moins d’une semaine pour le réaliser).

Quand ?

  • Aujourd’hui : retours sur les spécifications ;
  • 24 mai OPDS 0.9 ;
  • 24 juin OPDS 1.0 ;
  • été : documents d’info sur des domaines spécifiques et modes d’acquisition

Le modèle économique d’OPDS est semblable à celui de Firefox, outil ouvert adossé à des organisations.

Quels usages des tablettes de lecture en BU ? – Delphine Merrien (SCD Toulon)

Suite du compte-rendu, assuré en binôme avec Gaël, des Journées Couperin sur le livre électronique, qui se sont déroulées à Lille, les 17 et 18 mai.

Delphine Merrien (SCD de l’Université de Toulon-Var) présente les résultats d’enquête de la CeB auprès des BU intéressées par le prêts de tablettes

États des lieux

Qui prête ?

Angers et Toulon seuls établissements d’enseignement supérieur à prêter.
La bibliothèque de l’École des chartes et le SCD Lyon 1 se préparent pour la rentrée. L’École des Chartes réfléchit à la question des contenus (attente de l’évolution des tablettes)
Ce type de projet est souvent appuyé par des personnes en interne, motivés, technophiles. Difficile mobilisation des personnels (6 personnes à Toulon)

Quel public ?

Le noyau dur des emprunteurs potentiels est composé plutôt d’homme, technophile et lecteur.
Le SCD Toulon distribue une brochure pour expliquer le fonctionnement des tablettes. Lyon 1 et EdC préparent également des documents d’accompagnement.

Quel cadre ?

Test obligatoire par le personnel des bibliothécaires,  enseignants-chercheurs et étudiants technophiles. Test pendant 1 an à Toulon avant la phase de production. Test de 3-4 mois à Angers
Conclure des partenariats : Sony pour Angers. S’appuyer sur une offre de base d’un éditeur ou agrégateur de contenus.
Fixer le cadre réglementaire : 8 mois pour la validation de la charte (18 mois en tout) auprès du conseil de la documentation à Toulon.
Durée de prêt d’un mois à Toulon, entre 21 et 28 jours renouvelables à Angers. Pas de consultation sur place en raison du caractère nomade de la tablette.

Quelle communication ?

Communication surtout dans les locaux de la BU et sur le site web.

Freins actuels

Quelles tablettes ?

Sony PRS 505 pour Toulon ; Sony PRS 505 et Cybook Gen Gen 3 pour Angers
L’élégance de l’objet, la facilité de la remise à zéro, le confort de lecture sont appréciés durant la phase de découverte.
Au niveau des fonctionnalités, si le marque-page est apprécié, beaucoup regrette l’absence de connectivité (frustration par rapport aux équipements actuels), l’absence d’écran tactile, le noir et blanc et la gestion hasardeuse et déconcertante des formats.
Autres limites techniques : chargement relativement long avant la première utilisation, installation d’une application pour gérer la bibliothèque

Quels contenus ?

Collection numériques en développement. Environ 600 documents à Toulon + quelques pistes pour les collections libres.
Problème des DRM : plusieurs étapes à franchir avant de jouir du produit
Problème pour faire émerger une offre de masse en français.

Quels services ?

Pour faciliter la prise en main des machines par les utilisateurs, le personnel doit être mobilisé. Les contraintes techniques actuelles entraine un besoin en accompagnement plus important.

Une déception ?

L’accueil est globalement favorable. Le marché des tablettes de lecture est en pleine expansion ; beaucoup de nouveaux produits. Le bibliothécaire est valorisé par ce nouvel outil qui séduit le lecteur (gain de place, nomadisme)
Les nouvelles tablettes devront apporter la connectivité permettant de s’affranchir d’un chargement souvent fastidieux.

Il convient de dépasser l’indifférence et la perplexité, en construisant une politique de la dématérialisation (encore beaucoup de travail).

National e-books Observatory Project – Lorraine Estelle (JISC)

Suite du compte-rendu, assuré en binôme avec Gaël, des Journées Couperin sur le livre électronique, qui se sont déroulées à Lille, les 17 et 18 mai.

Lorraine Estelle est Chief Executive Officer au JISC, elle a participé au National e-books Observatory Project. Le rapport final et les rapports d’étape sont tous disponibles sur le site du National e-books Observatory Project. Le prezi de son intervention lilloise est également disponible.

[Lorraine Estelle a livré, à mon sens, la plus intéressante et la plus riche intervention en ce qui concerne les principaux enjeux des e-books (note du blogueur)]

Retour sur la méthodologie du JISC

  • 2 enquêtes furent menées et comparées en janvier 2008 et janvier 2009
  • analyse des logs de la plateforme Myilbrary
  • focus groups (entretiens collectifs) d’étudiants, d’enseignants et de bibliothécaires
  • analyse des statistiques de circulations dans les bibliothèques
  • analyse des ventes au détail des livres acquis.

Le JISC a acquis 36 e-books (600.000 £) dans 4 disciplines (Business-management, Science de l’ingénieur, Médecine, Médias-communication), mis à disposition de toutes les institutions d’enseignement supérieur du Royaume-Uni. Leurs usages furent analysés.

Résultats des deux enquêtes (52 000 réponses au total)

Les étudiants en business-management ont lu plus de e-books que les étudiants en médecine.

Les usagers ont plutôt trouvé leur e-book par la bibliothèque universitaire (puis disponible gratuitement sur le web). Concernant la fourniture de e-books, les attentes des usagers (étudiants+enseignants) vis à vis de la BU ont considérablement augmenté entre l’enquête de 2008 et l’enquête de 2009. Sur ce point, la bibliothèque académique devient un partenaire incontournable.

Les utilisateurs de e-books les consomment par petits morceaux, en « picorant » quelques chapitres. La plus grande partie de temps de consultation est consacré à la navigation et à la recherche de contenu pas à la lecture. En moyenne, il passe 13 minutes à consulter un e-book et 83% passent moins d’une minute par page (conclusions à partir des analyses de logs). Ils préfèrent imprimer les pages et prendre des notes plutôt que d’utiliser les fonctionnalités proposées par les plateformes.

La lecture se fait majoritairement sur l’écran ou en mélangeant écran et impression.

La consultation des e-books se fait tout au long de la journée avec un pic entre 8h et 14h, l’accès se fait majoritairement sur le campus.

A court-terme, rien n’indique que la mise à disposition gratuite des e-books à la communauté universitaire a une influence négative sur les ventes de livres aux étudiants.

La bibliothèque face aux e-books

Concernant la signalisation, les bibliothèques ont un challenge important à relever. Il subsiste encore beaucoup de confusion entre le catalogue, la recherche fédérée et le site de la bibliothèque. La recherche et la découverte doivent être les plus simples possibles. Le catalogue comme point principal d’accès aux ressources nécessitent des métadonnées de qualité. « …users have literally re-frame their minds when movieng from one system to another and this require patience and time consuming. »

Le PDF comme principal format des e-books contraint (lock-down),  on ne jouit pas encore de toutes les fonctionnalités du net.

A la recherche d’un modèle économique

La vente de manuels (textbooks) aux étudiants représente 70% à 90% des revenues des éditeurs (plus 200 millions de £ en 2006/2007 à comparer au 50 millions de £ de vente aux bibliothèques académiques. La vente des manuels aux étudiants est en stagnation mais elle constitue une part non négligeable de leurs dépenses.

Les enquêtes ont montré que les e-manuels ne se substituaient pas aux versions papier mais constituaient un complément nécessaire, il s’agit donc d’un nouveau marché. L’immobilisme n’est pas de mise, l’importance de trouver une modèle économique viable pour les e-books augmente à mesure que les attentes des usagers deviennent plus prégnantes.

Tester les modèles économiques

Le JISC procède  à 4 tests pour définir un modèle économique viable (résultats attendus fin 2010). Ces tests regroupent 8 éditeurs de manuels, 10 universités, 3 agrégateurs de contenus, 17 manuels de premier ordre (core textbooks).

Chaque test poursuit un objectif spécifique :

  • Test 1 : mesurer la viabilité d’un accès illimité à des e-manuels via des agrégateurs ou via la plateforme spécifique de l’éditeur.
  • Test 2 : explorer le rôle de la bibliothèque dans la fourniture aux étudiants d’une variété d’accès au e-manuels (accès à un chapitre, pay-per-view, impression uniquement, e-only ou combinaison impression/électronique)
  • Test 3 : évaluer l’impact sur les ventes de e-manuels lorsque la bibliothèque propose un accès électronique et déterminer ce que préfèrent les usagers parmi plusieurs options (accès via la bibliothèque, commande d’une version papier ou version hybride papier/élec, commande d’une version e-only, commande ou location d’un chapitre.
  • Test 4 : déterminer si l’accès aux e-manuels par la bibliothèque améliore les ventes

Des licences clés en main

Le JISC en collaboration avec The Publishers Association a rédigé un ensemble de recommandations pour les contrats de licences afin de gagner du temps, de mieux communiquer avec les utilisateurs, de traiter des questions d’accès aux archives, d’inclure des standards comme Counter, les procédés anti-plagiat ou les questions d’accessibilité et d’oeuvrer pour des métadonnées de qualité qui aideront à la recherche.

10 conseils pour réussir avec vos e-books

  1. Répondez aux demandes de vos usagers.
  2. Promouvez l’image de marque de votre bibliothèque, personnalisez vos plateformes de e-books.
  3. Rendez l’accès à distance plus facile et plus fiable.
  4. La pub, ça marche. Développez une stratégie pour votre bibliothèque.
  5. Utilisez plusieurs méthodes promotionnelles. Les e-books sont, par essence, invisible.
  6. Mettez en avant les produits les plus efficace. Mettez la pression sur ceux qui ne le sont pas.
  7. Utilisez le catalogue, c’est encore la meilleure voie pour accéder aux contenus.
  8. Tant que les plateformes ne seront pas totalement intuitives, la formation et l’accompagnement seront indispensables.
  9. Expérimentez les modèles économiques.
  10. Développez des accès aux contenus user-friendly.
Catégories :Aut'trucs, Docélec, Non classé

Lire un document numérique – Thierry Baccino (Laboratoire LUTIN)

21 mai 2010 1 commentaire

Suite du compte-rendu, assuré en binôme avec Gaël, des Journées Couperin sur le livre électronique, qui se sont déroulées à Lille, les 17 et 18 mai.

Thierry Baccino est professeur de psychologie cognitive et ergonomique, directeur scientifique du LUTIN et auteur de La lecture électronique (2004, Presses universitaires de Grenoble). Il travaille depuis environ 20 ans sur la lecture électronique, sur la lecture dans le passage du livre imprimé (écriture continue sur codex, parchemin) au livre typographié et sur écran (écriture segmentée). Lors de ces mutations, le lecteur, lui,  n’a pas forcément changé.

La multitude d’informations caractérise ces dernières années :  comment accéder à l’information de manière pertinente ?  comment le lecteur s’adapte-t-il ?  la recherche de l’immédiateté et de l’efficacité de l’information semblent être la norme actuelle.

Les psychologues recherchent les traces de la pensée, à la même manière des archéologues.
La comparaison entre la lecture d’une page du site web Science et vie (écrémage : lecture des titres/sous-titres) et d’un article papier des années 70 de la même revue (lecture continue) montre la différence des pratiques de lecture. Il n’en saurait être autrement compte tenu de la divergence des structures des exemples présentés (page d’accueil d’un site web vs article de vulgarisation scientifique dans une mise en page austère)

Il existe deux types de lecture : la lecture qui nécessite l’assimilation du contenu (article) et la lecture qui nécessite une attention soutenue (lecture d’une page web). Il n’est pas évident pour le cerveau d’analyser cela (problème du déficit de compréhension).

Entre papier et écran, les principales différences techniques sont :

– papier : lumière naturelle, page à page, linéaire, texte/image
– écran : rétro-éclairage (principale source d’inconfort visuel), scrolling, non linéaire, texte/image/sons/vidéo

Il existe également des différences individuelles, notamment dans la rapidité de la lecture (lecteur rapide : 500 mots/min ; lecteur lent <100 mots/min). Sur écran, le nombre de lecteurs lents augmentent.
Le processus de lecture se compose de 3 étapes : détection des lettres (visibilité), l’identification des mots (discriminabilité) et la compréhension des mots (intégration).

Nous fixons seulement 4 lettres d’un mot (vision fovéale). L’empan visuel est la fenêtre autour de ces 4 lettres (la position de la fenêtre par rapport aux 4 lettres dépend du sens de la lecture, plus large à droite lorsqu’on lit de gauche à droite et plus large à gauche lorsqu’on lit de droite à gauche).

Sur écran, l’empan visuel diminue en fonction du contraste du texte, de l’espacement inter-caractère ou de l’emploi de colonnes réduites. Lorsque l’empan visuel est diminué, l’attention visuelle qui guide le regard est perturbée. Notre attention n’est pas localisée au même endroit que notre vision.

Règle générale dans le processus de lecture : le lecteur fixe le centre du mot (sinon prise d’information dégradée car multiplication des prises d’information).

Le scrolling : le déplacement des mots perturbe la mémoire spatiale des mots (se souvenir de la place des mots ou de l’info dans la page). Le scrolling constitue un élément négatif dans la prise d’information.

Au niveau de la compréhension, l’hypertexte met le lecteur dans la position de l’auteur. En fait, il est beaucoup plus difficile de choisir soi-même le chemin de lecture (avantage pour le papier) :  désorientation, difficulté à lier les informations entre elles, difficulté de mémorisation.

Les liseuses disposent d’avantages indéniables  (lisible en lumière naturelle, accessibilité, nomadisme, réalité augmentée) mais pâtissent encore de certains inconvénients (qualité du blanc, pas de couleurs pour le moment, lenteur du changement de page).
[Ces conclusions sont néanmoins remises en cause par l’arrivée de nouvelles machines censées marquer une tendance lourde dans l’industrie des « tablettes de lecture » (Ipad notamment)] (note du blogueur)
La lecture a évolué, l’Homme ne s’adapte pas aussi vite, il n’est adaptable que dans une certaine limite (oeil, mémoire).